Ancien fleuron industriel du Sud de la France, la ville d'Alès connaît aujourd'hui toute une série de symptômes économiques : un fort taux de chômage, une dégradation urbaine importante, des problèmes de transports ou encore une forte ponction dans les ressources fiscales de la ville. Cette crise urbaine (Bateman, 1971 ; Paddeu 2015) entraine à l'échelle des quartiers et des individus une forte montée des processus de précarité, considérés ici comme le manque d'une ou plusieurs sécurités (Joseph Wresinki, 1987). La ville se perfore (Oswalt 2006), les friches urbaines augmentent (Ambrosino, 2005) et les inégalités s'accroissent, incitant les individus à avoir recours à toute une série de stratégie pour faire face à la crise. Les lieux en friche, facilement appropriables, et les nouveaux processus d'économie informelle peuvent être considérés comme des espaces d'opportunité autant pour les populations locales que pour les pouvoirs publics pour développer une ville durable, égalitaire (Oswalt 2006). La pratique agricole en ville, qu'elle soit informelle ou institutionnalisée, constitue un outil de lutte contre la vulnérabilité alimentaire et sociale des citadins les plus pauvres.

Tout en questionnant les concepts de crise urbaine et de précarité à différentes échelles d'analyse (de l'aire urbaine au pratiquant agricole), nous proposons lors de cette communication de croiser une approche par lecture paysagère et par entretien de terrain pour traduire des processus de précarité. Nous partons ici de l'hypothèse que les pratiquants agricoles précaires vont avoir recours à des stratégies particulières dans leurs activités agricoles. La récupération de matériaux, l'appropriation d'espaces marginaux, la présence d'économie informelle, ou encore des processus de baraquement sont autant d'indice visuels qui traduisent de la part des jardiniers des adaptations particulières au contexte urbain. Cette lecture paysagère complétée par des entretiens auprès des acteurs urbains nous permettrons de comprendre les liens qui se construisent entre pratiques agricoles et précarité. Enfin nous monterons en généralité pour réfléchir à la place de l'agriculture dans les villes en crise et dans quelle mesure la pratique agricole peut être considérée comme un outil d'égalité sociale.

Communicant : Damien Deville, doctorant en géographie urbaine à l'UMR Innovation sous la direction de Christophe Soulard et Lucette Laurens. Sujet de thèse « l'agriculture urbaine dans un contexte de crise. Une étude comparative entre la ville d'Alès et de Porto ».