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La ville, un milieu innovateur pour le projet agro-environnemental ? La mise en œuvre du SCoT de Bordeaux entre recherche, action et formation
Emmanuelle Bonneau  1@  
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université Bordeaux Montaigne, Centre National de la Recherche Scientifique : UMR5319
Maison des Suds - 12, esplanade des Antilles - 33607 Pessac cedex -  France

En 2000, le Schéma Directeur de Bordeaux proposait une innovation remarquée par les observateurs scientifiques et techniques (Masboungi, Mangin 2009, Labat 2011) en matière d'intégration des espaces agricoles, forestiers et naturels au projet d'urbanisme. Une même « charpente paysagère » permettait alors d'articuler les orientations de développement urbain et la mise en valeur des espaces périurbains. Dix ans plus tard, la révision de ce document s'inscrit dans un cadre institutionnel vertueux, lié à la mise en œuvre des lois Grenelle pour l'Environnement. La mise en valeur des continuités écologiques s'y traduit par une carte d'orientation pour une « Métropole nature » dont la mise en œuvre s'appuie sur une « couronne de sites de projets agricoles, sylvicoles et naturels » autour de Bordeaux.

En dix ans, d'une démarche défensive et incitative, le Sysdau -syndicat mixte porteur du Schéma de Cohérence Territoriale (SCoT) de l'aire métropolitaine bordelaise- a évolué vers une attitude pro-active visant à accompagner la mise en œuvre de projets agro-environnementaux au niveau local. Là encore le document d'urbanisme innove car si plusieurs métropoles françaises (Montpelier, Rennes) ont rapidement adopté des stratégies d'aménagement où la préservation de l'espace agricole conditionne l'urbanisation (Jarrige et al. 2009), le Sysdau se positionne au delà, en tant qu'animateur d'un projet agro-environnemental pendant la durée de la mise en œuvre du SCoT.

Mais à l'appui de quelles méthodes ? Rompus à l'exercice du projet urbain, les techniciens, urbanistes, ignorent les mécanismes de transformation des espaces agricoles et forestiers. En quoi la ville, lieu de la fabrique urbaine et de ses savoir-faire, pourrait-elle se constituer en « milieu innovateur » pour le projet agro-environnemental ?

Cette proposition de communication s'appuie sur l'expérimentation menée depuis 2012 dans le cadre du contrat de recherche BIOREGION (Berland-Berthon 2012). En 2014, le Sysdau s'est constitué en partenaire de cette recherche-action afin de poursuivre la mise en œuvre de la stratégie nature du SCoT. La notion de « milieu innovateur » (Aydalot 1986) est ici mobilisée pour explorer les conditions d'un changement de posture vis à vis de l'agriculture dans les documents d'urbanisme ; la charte des paysages en cours d'élaboration par le Sysdau (2016) se démarquant d'une vision esthétisante en cherchant à encourager des projets locaux de développement socio-économique. Cette évolution a été accompagnée, en interaction avec l'université, par la traduction d'apports scientifiques et l'interprétation de modèles opératoires européens, dans la démarche politique et technique. S'appuyant sur les savoir-faire du projet urbain, elle repose sur une construction partenariale et une validation progressive des constats et des objectifs avec les acteurs du monde rural : collectivités territoriales périphériques et porteurs individuels de projet.

Notre proposition vise à éclairer le transfert, dans le contexte de l'urbanisme en France, de méthodes et de concepts produits à l'université par les enseignants-chercheurs de l'école territorialiste italienne (Magnaghi 2014) ; notamment en analysant les ressources de la notion de « patrimoine territorial » (Poli 2015) comme vectrice d'un projet agro-environnemental et urbain. L'exploration du « milieu innovateur » bordelais, nous permettra de mettre en évidence le système d'acteurs investis dans ce processus en cours. En nous positionnant d'un point de vue de chercheuse, impliquée dans l'expérimentation, et au moyen d'entretiens avec les techniciens du Sysdau, nous envisagerons enfin les difficultés de cette démarche d'apprentissage collectif qui repose sur la transmission et sur une construction de connaissances partagée, en vue d'une conciliation d'usages concurrentiels, voire antagonistes, de l'espace, en impliquant une nouvelle évolution des logiques de projet de l'urbanisme.

A ce stade, notre propos visera à dépasser le cas bordelais pour présenter des résultats en matière de mise en pratique d'une recherche en partenariat qui associe l'enseignement à l'expérimentation par l'action (recherche-action-formation) et de transfert des méthodes négociées et dessinées du projet urbain au projet agro-environnemental.


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